Unité Nationale

L’UNITÉ NATIONALE EN MAURITANIE : CRAINTES ET ESPOIRS

Mémorandum prospectif du Collectif des Cadres Mauritaniens Expatriés (CCME)

Des siècles durant, les populations de l’espace constituant la Mauritanie actuelle ont, dans l’ensemble, cohabité en paix et en relative symbiose. En dépit des tensions identitaires qui ont parfois émaillé son histoire, le pays a toujours su compter sur l’amour de tous ses enfants, pour rester debout. Les différentes composantes de sa population n’ont cessé, en effet, de nouer des alliances, les unes avec les autres, en s’affranchissant parfois des frontières ethniques dont on peut dire qu’elles n’ont réellement commencé à s’affirmer comme telles qu’avec l’affirmation de l’Etat post-colonial.

Ainsi, les noirs de Mauritanie ou Soudanophones (Haal-Pulaar en[1], Soninko, Wolofs), riverains du fleuve Sénégal, étaient-ils affectés par les scissions fratricides pour le leadership dans chacun des émirats maures ; ils s’y impliquaient au gré des parentés, des intérêts et des pactes qui les liaient davantage à un prétendant qu’à son rival.

La référence commune à une même culture arabo-musulmane partagée, attestée notamment par les écrits du chroniqueur bien connu de la Vallée du Fleuve, Cheikh Moussa Kamara, a souvent été nourrie de la fréquentation des mêmes établissements d’enseignement traditionnel, comme celui des Ahl al-‘Âqil, où l’almâmi ‘Abdoul -Qâdir Kane a côtoyé El Moktar O. Bouna et Ahmed O. al-‘Âqil à l’écoute de la célèbre Khadija mint Muhamd al-Âqil, enseignant la logique d’Aristote. Une transmission qui n’a pas toujours été à sens unique, nord-sud, comme le voudrait une vision simplificatrice des échanges culturels dans la sous-région sénégalo-mauritanienne. Témoin, l’enseignement de la métrique (‘ilm al-arûd) reçu par l’un des plus grands lettrés maures du XXe siècle, El Moktar O. Hamidoune, de la part du maître wolof, Mohamed El Amine Cissé, qui fut lui-même élève du père d’d’El Moktar dans les dunes de l’Iguîdi. Autre témoignage de ces influences croisées : les itinéraires multidirectionnels des obédiences confrériques et des solidarités/allégeances qu’elles ont contribué à faire naître. El Haj Omar Tall a bénéficié du soutien enthousiaste (celui de Cheikh Mohamed El Mami du Tiris/Inchiri…) ou de la présence directe à ses côtés (celle de Sîdi ‘Abd Allah O. Mbouja de Tichit…) de certains des lettrés bizân les plus en vue, même s’il a eu à affronter une coalition hostile où Sid’Ahmed El Bekkay O. Cheikh Sidi Mohamed a joué un rôle, semble-t-il, décisif. On connaît, par ailleurs, l’influence initiale des Ahl al-Shaykh Sidiyya sur la Murîdiyya de Cheikh Ahmadu Bamba, aux nombreux et influents disciples parmi les bizân (Sîd Ahmad w. Asmuhu…) et les effets-retour de la tijâniyya ibrâhimiyya de Kaolack sur ses diffuseurs Idawa’li du sud-ouest du Trarza. Dès l’accession de la Mauritanie à la souveraineté et l’avènement d’un Etat moderne, l’unité nationale a constitué une préoccupation majeure chez les pères fondateurs. Malgré quelques soubresauts, dès la fin des années 1960, puis 70, l’harmonie et la concorde imprégnaient les rapports entre les entités culturellement différenciées. Aujourd’hui, à l’ère des « Identités meurtrières », pour reprendre l’expression de l’académicien franco-libanais Amine Maalouf, notre unité nationale souffre d’une fragilité évidente qui ne saurait échapper à l’observateur profane et, encore moins, à la vigilance d’une avant-garde comme celle regroupée au sein du Collectif des Cadres Mauritaniens Expatriés (CCME).


[1] Terme signifiant « ceux qui parlent pulaar » et qui s’efface progressivement au profit des termes « Fulɓe » ou Peuls

Par Unité Nationale, nous n’entendons évidemment pas la dissolution de toutes les spécificités dans une culture unique mais plutôt la perception de l’appartenance à des valeurs unitaires d’une nation commune, la cohabitation pacifique dans la diversité des idées des membres de la société, par l’harmonie et l’entente, en vertu d’une communauté de destin où prennent racine une vision commune et le projet d’un accomplissement collectif.

1. Diagnostic : dangereusement, le mur se lézarde

Les voix de la discorde se font entendre, depuis déjà le milieu des années 1960 avant de s’exacerber dans les années 1980, au nom de l’appartenance à telle ou telle composante ; les anathèmes proférés par les uns contre les autres donnent toute la mesure de la menace et laissent entrevoir une possible dissolution de l’Etat dans la surenchère des appartenances communautaires exclusives.

1.1. Le regain des réflexes identitaires

Le constat alarmant d’un fossé se creusant progressivement prend des proportions de plus en plus inquiétantes. Tout, ou presque tout, est prétexte à la convocation de la lecture identitaire particulariste. La création d’un mouvement ou d’un parti, sous la dénomination – tacite ou affichée – d’un groupe socio-ethnique illustre l’enracinement de cet état de fait et, surtout, sa banalisation. Les effets de fissuration du consensus ne se limitent plus à la discorde et aux échanges d’invectives entre individus porteurs de subjectivité conflictuelle. Ils touchent désormais les classes sociales, y compris dans la même communauté linguistique. Le mouvement des forgerons et le Manifeste des Haratines constituent les exemples les plus récents. Au rythme où s’enchaînent les événements, l’émergence d’une corporation des « marabouts » ou d’une corporation des « guerriers » appartient à l’ordre du possible, si ce n’est le cas déjà.

1.2. L’anonymat virtuel des réseaux sociaux : un facteur aggravant

Les voix de la désunion s’expriment, de façon plus explicite, sur les réseaux sociaux, où la garantie de l’anonymat et son immunité ouvrent les vannes de l’intolérance et débrident une violence inouïe. Le procédé permet de couvrir l’Autre d’injures sans s’exposer à d’éventuelles conséquences.  Ainsi, l’auteur du propos distille-t-il sans retenue et impunément le poison de la haine qui finit par nourrir et entretenir, auprès d’un public de plus en plus réceptif, les pulsions du racisme, la ségrégation sociale, le repli agressif.

1.3. De la ségrégation géographique : chacun son territoire

Ainsi, le quasi-confinement géographique des composantes ethniques dans certains quartiers de Nouakchott et des grands centres urbains accentue-t-il le clivage quand il ne dessine pas les contours d’une ségrégation sociale doublée d’une autre, spatiale celle-là. A la géographie des particularismes, vient s’ajouter la séparation –volontaire ou subie- des citoyens dans presque tous les aspects de la vie, notamment à l’école. La césure atteint un tel point de maturation que les Mauritaniens ne peuvent plus communiquer entre eux sans intermédiation. Il suffit de passer devant une école privée, aux horaires de sortie, pour savoir, à l’observation des élèves et du personnel d’encadrement, à quelle ethnie elle s’adresse ou appartient. L’exemple vaut pour les cliniques privées, entre autres sites.

Ce degré de cloisonnement révèle le déficit de confiance entre les diverses composantes de la population. Le défaut d’entente crée et entretient l’environnement propice à une rupture violente qu’une étincelle, même ténue, provoquerait. En juin 2017, l’actualité brûlante nous en a encore donné une illustration. Il a suffi d’une manifestation de chauffeurs de taxi suite à la mise en œuvre d’un nouveau code de la route, pour que les apprentis pyromanes et les pêcheurs en eaux troubles tapis dans l’ombre, à l’affût de la moindre occasion pour souffler sur les braises, fassent circuler de fausses informations, susceptibles d’exciter le trouble inter-ethnique. Ils n’ont hésité à procéder à des photomontages pour alimenter les peurs et les haines. L’utilisation des outils modernes de communication, notamment les groupes de discussion électronique ont très rapidement accordé un surcroît d’ampleur à la rumeur, comme à la veille des crimes de masse, commis entre 1989 et 1991. Par ailleurs, l’isolement et la réciprocité de la défiance ont entraîné une raréfaction – sinon la disparition- des mariages mixtes et des métissages. De part et d’autre, le legs de la société du brassage, sensible dans les villes au lendemain de l’indépendance, s’effrite au profit du sectarisme endogamique qui élargit le champ de l’indifférence distante.  Cependant, l’aspect le plus préoccupant de cette fracture réside dans les appels à la sécession, lesquels deviennent plus audibles. La gravité du défi requiert, de tous les intellectuels dévoués, l’effort de restaurer l’harmonie et l’entente avant qu’il ne soit trop tard.

2. Les sources du mal

Sans prétendre à l’exhaustivité, l’on peut passer en revue certains facteurs qui ont profondément ébranlé les assises de notre unité :

2.1. La domination des nationalismes

L’apparition de mouvements idéologiques identitaires, qu’ils soient arabophones ou soudanophones, et leurs tentatives d’imposer une vision d’exclusion, au mépris de la diversité et de l’intrication du peuplement et des cultures, a entrainé une surenchère de slogans alimentant la discorde, puis une suspicion, perceptible à tous les niveaux de la vie en commun. La plupart du temps, les porteurs de ces idéologies dominantes ont développé plus de solidarité avec des entités extérieures qu’avec les autres composantes nationales souvent considérées comme ennemies absolues. Celles de ces mouvances qui parvinrent à infiltrer les hautes sphères de l’appareil d’Etat ou qui ont joui d’une puissance à même de leur permettre d’influencer les orientations nationales en ont usé, le long de plusieurs décennies, pour réaliser leurs prétentions hégémoniques en Mauritanie.

2.2. La place de l’armée dans la scène politique

La «politisation de l’armée sur fond d’exclusion» ou la «militarisation de la politique», consacraient la succession des coups d’état, dirigés chaque fois par des officiers issus de la même mouvance ethnique, avec des motivations d’ordre idéologique ou régionaliste, selon les cas. Les putschistes se reposaient, pour la gestion du pays, sur des personnes choisies en raison de leur proximité affective et tribale (au sens générique), mais pas toujours de leur compétence. Quoique excitée et entretenue, à l’origine, par des cadres civils, la mentalité de l’esprit de corps et de l’appartenance exclusive, qui dure depuis bientôt 40 ans, aura malmené notre vivre en commun au point d’altérer les équilibres de cohésion dans les forces armées et de sécurité, brisant ainsi le mythe fondateur de la fraternité au combat, tant démontrée, par exemple durant les années de guerre pour le Sahara Occidental.

2.3. Le déficit de gouvernance

L’échec des gouvernements successifs à instaurer une bonne gouvernance et une gestion d’équité conforte les populations, sous l’emprise de la discrimination et de la misère, dans un sentiment d’abandon par la communauté nationale. Ce faisant, les pouvoirs consécutifs lâchaient la bride au clientélisme. Ainsi, des agents peu scrupuleux (administrateurs, hauts responsables, diplomates, juges et forces de sécurité) guidaient les politiques publiques et pratiquaient l’injustice, la prévarication, la préférence relationnelle, quand ils ne commettaient des crimes raciaux, sans jamais en être punis.

3. Perspectives

En Mauritanie, la quête de l’unité nationale demeure un exercice complexe, tant le tabou et le non-dit parasitent une matière dont la sensibilité se mesure à l’embarras qu’elle provoque. 

Pour certains, le caractère sensible doit conduire à éviter toute discussion qui risque de déboucher sur le constat de positions inconciliables. Pourtant, la maturité des Mauritaniens et leur désir de vivre ensemble dans un cadre qui préserve les droits de tous, sans distinction aucune, devraient au contraire permettre, d’échanger sereinement pour trouver des points de convergence. Le sérieux du sujet requiert une appréhension lucide, donc critique. Il est en effet irréaliste de continuer à vanter les mérites de l’Unité Nationale alors que certains ont le sentiment de vivre comme des citoyens de seconde catégorie, sevrés des mêmes chances, pour accéder au pouvoir, fructifier des biens ou assurer une bonne éducation à leurs enfants. Jusqu’à quel degré d’indulgence naïve peut-on nourrir l’illusion de la solidarité et de l’avenir en partage quand les concitoyens se regardent comme des étrangers, au bureau, dans la rue, dans le taxi ou sur un lit d’hôpital ? Notre propos ne consiste point à indexer telle ou telle partie d’avoir altéré ou compromis le fondement de la paix sociale. Plus humblement, nous nous contenterons d’esquisser quelques pistes de réflexion afin d’aider à formuler des modes de règlement à la mesure de l’enjeu, pour ne pas dire, à la hauteur de son urgence.

3.1. L’école, point de départ, lieu de rencontre et de communication

La question de l’éducation et de l’évolution du système éducatif est au cœur du sombre tableau qui vient d’être brossé. Il convient, avant d’entrer dans quelques observations sur ladite évolution, de rappeler une ou deux caractéristiques du paysage sociologique qui a préparé le terrain à l’arabisation, quel que soit, par ailleurs, le jugement que l’on porte sur cette transformation du dispositif pédagogique public mauritanien.

1°) La Mauritanie, à la différence des pays « francophones » ou « anglophones » de l’Afrique subsaharienne, dispose d’une tradition multiséculaire d’enseignement en arabe, d’orientation essentiellement scolastique et religieuse, apanage et monopole de quasi-castes de lettrés (zwaya, toorobbé, « marabouts », …). Elle n’est pas une terre pédagogiquement vierge.

2°) Le taux de scolarisation du pays, au lendemain de l’indépendance, se situait aux alentours de 5%

3°) La vague de sécheresse de la fin des années 1960, la sédentarisation des nomades et le puissant mouvement d’exode en direction des villes, ont engendré une demande de scolarisation explosive à laquelle le peu d’infrastructure en la matière légué par la colonisation ne pouvait répondre.

Depuis les débuts de l’Etat mauritanien, des réformes successives du système éducatif, marquées notamment par une arabisation progressive de l’école publique mauritanienne, ont suscité et reproduit des frictions, à présent sédimentées en contradictions structurelles. La plus emblématique date des “ évènements de 1966”: des cadres,  citoyens natifs du sud de la Mauritanie, ont produit un manifeste contre une révision pédagogique où ils percevaient les conséquences ultérieures d’une imposition de la langue arabe. Pour les auteurs, cette arabisation par contrainte, risquait, à terme, de les marginaliser et de porter atteinte à leurs personnalité et intérêts futurs. Depuis, aucune relecture du système éducatif n’a réussi à démentir ces craintes et rassembler toutes les composantes du pays. Pire, elles ont abouti à la formation de deux générations qui ne se connaissent plus, par défaut de pratiquer une langue commune et d’étudier dans les mêmes salles de classe. L’une apprend en Français, l’autre en Arabe, dans des filières différentes ; ainsi, toutes suivent des cursus qui se tournent le dos.

Ainsi piégés, les Mauritaniens en arrivent à un degré de cacophonie et d’incompréhension tel que la communication ressortit, désormais, du parcours laborieux entre responsables et décideurs jusque dans les plus hautes sphères du pouvoir. Au Parlement, comme lors des séances du conseil des ministres, ou pendant les plaidoiries des avocats dans les prétoires le recours aux traducteurs s’impose.

Pour que les Mauritaniens se reparlent, se rencontrent et se comprennent, l’école, seule, facilitera la promotion des valeurs de fraternité, de solidarité et de civisme chez les jeunes générations. L’objectif suppose une nouvelle approche de l’enseignement général qui favorise une éducation solide, indispensable au fondement de la République, à l’abri de la surenchère politicienne et de la compétition des particularismes.

L’expérience de pays arabes proches, ayant aussi tiré des leçons de leur politique d’arabisation, qui sont revenus à des systèmes plus équilibrés de bilinguisme, devrait inspirer les dirigeants politiques mauritaniens en vue de la réhabilitation de notre système éducatif. Cette réhabilitation équivaudrait, en outre, à faire revivre la bonne habitude d’antan, de réunir les fils de Mauritanie sous le même toit, dans un espace unique où ils apprendraient à se connaître et éprouver le sentiment d’animer un récit commun. Il va sans dire que l’apprentissage de ce minimum ne doit, en aucune manière, se réaliser au détriment des langues nationales et des cultures spécifiques. Au contraire, le projet de restauration éducative devrait comporter des cours d’histoire nationale pour rappeler aux « décideurs de demain » tout ce passé de cohabitation, d’alliances, de relations interraciales et sociales, bref cet écheveau de liens qui rapprochaient. L’inflexion novatrice de l’école dissiperait bien des malentendus et diluerait des équivoques qui suscitent le ressentiment.

3.2. Restaurer la confiance

Chacune des composantes du peuple mauritanien porte sa part de responsabilité dans la perte de confiance entre elle et les autres. Au fil des années chargées d’épreuves, chaque groupe ethnique confine ses membres dans un « apartheid mental ». Or, la volonté de vivre ensemble et la confiance mutuelle ne s’accommodent des idées préconçues et des préjugés. Il est donc urgent de recréer les conditions nécessaires à la cohabitation et à la mixité de toutes les composantes pour éradiquer ou, tout au moins, limiter la ghettoïsation des quartiers, notamment dans les grandes agglomérations. Les mariages mixtes qui ont donné à la Mauritanie nombre de princes, de guides spirituels, de héros profanes, dont des résistants et des poètes connus, entretenaient la conscience, pour ne pas dire l’évidence de l’identité de destin. A titre d’exemple, il convient de rappeler, ici, le mariage de Mohamed Lehbib (1800-1860), émir du Trarza avec Diombott Mbodj, princesse puis reine du Walo; de cette union naquirent deux grands successeurs, Ely Ould Mohamed Lehbib et son fils Ahmed Salem Ould Ely.

3.3. Dissiper les préjugés

La peur de l’autre conduit à la rupture, puis à la dispute et enfin à l’animosité durable. La crainte se manifeste de diverses manières : combien de compatriotes, d’horizons anthropologiques variés, se rencontrent en dehors des lieux de travail ou des mosquées, se rendent visite à domicile ? Que connaissent-ils des us et coutumes des autres ethnies (mariages, fiançailles, baptêmes condoléances, etc.) ? Combien se lient encore d’amitié avec leurs voisins ou collègues ? Bien que certains quartiers des grandes villes préservent un tant soit peu de mixité, la plupart des Mauritaniens vivent un voisinage marqué par la résignation devant l’impasse de la race et de la culture. Au lieu d’entretenir la curiosité et son corollaire vertueux, la découverte, c’est dans cette distinction subjective que se nichent le doute envers l’autre, à la fois cause et effet de la méconnaissance mutuelle.

Pour dissiper l’embarras et la distance induite, il s’avère impératif de faire connaître à toutes les composantes du peuple la richesse de la diversité dès lors que nous saurions mettre en avant et fructifier les points de convergence qu’elle recèle. A cet effet, les moyens sont légion. Les festivals, les compétitions sportives, les journées culturelles, les colonies de vacances et les mouvements de scouts devraient pouvoir servir grandement le dessein d’une proximité retrouvée. Cette stratégie nécessite, pour son efficience, l’implication positive et volontaire des médias. Lorsqu’il sera évident, à chacun, qu’aucune composante ne peut ni ne veut évincer ou marginaliser l’autre, le minimum d’apaisement se rétablira de lui-même.

Dans sa configuration territoriale et juridique actuelle née du fait colonial, la Mauritanie est une terre de rencontres entre des sociétés et des cultures différentes. Elle est -de fait- comme aimait à le répéter feu Moctar Ould Daddah, un trait d’union entre le monde arabe et l’Afrique noire. Sa vocation est de le rester, non de devenir une terre de division ou d’exclusion progressive, de fait, de certaines de ses composantes fondatrices. Son maintien comme entité politique pérenne et apaisée passe par une action politique courageuse et une pleine appropriation par tous, les gouvernants et les élites en premier, de cette réalité géographique et géopolitique. Des penchants excessifs ou exclusifs vers l’une ou l’autre facette de cette réalité conduiront inexorablement à la rupture des équilibres et fondements stratégiques sur lesquels devraient s’adosser l’Etat et le projet de nation qu’il sous-tend. Notre pluralité se nourrit de différences, non de différends, d’atouts à rebours du handicap. Elle constitue une chance, un signe de potentielle bonne santé, de vitalité -point de maladie, un bienfait -guère une malédiction. Oui, l’exercice consistant à étudier, disséquer et dénoncer les préjugés et les idées reçues, qui font le lit du racisme, contribuerait à lever les équivoques où s’ancrent l’incompatibilité, puis l’hostilité, enfin le dissentiment.

3.4. Liquider le passif humanitaire

Des décennies de pouvoir militaire ont, depuis le coup d’Etat de 1978, créé une entaille profonde dans la cohésion sociale. Depuis, le fossé n’a cessé de se creuser entre les Mauritaniens. Le pouvoir alors en place (1984-2005) a commis les pires exactions contre les citoyens noirs de Mauritanie, au prétexte que des officiers pulaarophones avaient planifié de le renverser. Les services de sécurité procédaient, alors, à l’arrestation des auteurs présumés. Malgré l’absence d’un début d’exécution, la Cour spéciale de justice les condamnait à des peines lourdes. Trois organisateurs, Saydou SY, Seydi BA et Amadou SARR, considérés leaders, tombèrent sous les balles du peloton d’exécution, le 6 décembre 1987. Des hommes politiques furent embastillés, avec le reste des putschistes, dans le bagne de Oualata où les conditions extrêmes de détention et la torture coutèrent la vie à Abdoul Ghoudous BA, Alassane Omar BA, Tafsirou Djigo et l’écrivain Tene Youssouf GUEYE. S’ensuivra, durant deux années, une purge ethnique de l’armée, par vagues successives, en 1990 et 1991.

Les associations de victimes et les organisations internationales des droits de l’homme ont pu documenter la pratique massive de la torture et des exécutions extrajudiciaires. Ces injustices avaient connu leur apogée lors des « évènements d’avril 1989 » entre la Mauritanie et le Sénégal, quand des milliers de Mauritaniens fuyant la persécution par délit de faciès, abandonnèrent leurs maisons. En sens inverse, le gouvernement d’alors procédait à une série de mesures d’exclusion administrative, de spoliation et de déportation, contre des populations, le plus souvent mauritaniennes, ciblées selon la couleur de leur peau. Les mesures ainsi prises s’inscrivaient, sans ambiguïté, dans la ligne de défense de l’arabité et de l’ordre établi en Mauritanie.  Un tel argument a fini par justifier la danse sur les cadavres de frères liés par la religion, le sang, l’histoire et la destinée en partage. Dans le même temps, plusieurs dizaines de milliers de noirs mauritaniens furent expulsés vers le Sénégal et le Mali.

Ainsi, a été violé le pacte non écrit de la cohabitation, que nos aïeuls tissaient, parfois dans la violence mais assorti de garde-fous, depuis des temps immémoriaux. Cependant quelques actes de substance et de symbole contribuèrent à rallumer la flamme de l’espoir. Ainsi, le Président de la République civil élu en avril 2007 déclarait, deux mois après son investiture, que la Mauritanie avait été « le théâtre d’atteintes massives aux droits de l’homme qui devaient culminer en 1989, 1990 et 1991. Des citoyens mauritaniens à l’intérieur et à l’extérieur du pays ainsi que des résidents établis en Mauritanie ont été victimes d’exactions graves et injustifiées. Des populations mauritaniennes paisibles se sont vues contraintes de quitter leur pays. Des atteintes cruelles à la dignité, des abus et dénis de droit d’une grande ampleur ont été commis ». Le premier magistrat reconnaissait la responsabilité de l’Etat mauritanien et formulait, en conséquence, les excuses longtemps attendues. Dans la foulée, des mesures étaient prises dans le cadre d’un accord tripartite entre la Mauritanie, le Sénégal et le Haut-Commissariat aux Réfugiés pour organiser le retour des réfugiés. Les premiers contingents regagnaient le sol national en janvier 2008.

Le coup d’état d’août 2008 n’a pas mis un terme à cette volonté. La politique de rapatriement s’est poursuivie. En vue de conduire les Mauritaniens à panser les plaies, le nouveau chef de l’Etat organisait une prière funéraire à Kaédi, le 25 février 2009, pour le repos des âmes défuntes. Pour autant, les plaies ne sont pas cicatrisées, parce que les revendications des victimes et des ayants droit n’ont été entendues : établissement de la chaîne des responsabilités, jugement des coupables, réparations suivies d’un pardon volontaire (donc facultatif), de la part des survivants. De surcroît, si certains ex-réfugiés ont pu récupérer une partie de leurs terres, la grande majorité en reste privée, au prétexte du fait accompli. Ils sont nombreux à n’avoir toujours pas recouvré leurs actes d’état civil. Cette situation avait conduit, sans succès, à une marche de protestation, entre Boghé et Nouakchott (300 km) en mai 2014.  Encore aujourd’hui, l’on discute de la meilleure manière de cautériser le traumatisme de cette sombre période de l’histoire de la Mauritanie pour que ses filles et ses fils se regardent, se reprennent à rêver, un jour, d’un avenir en partage.

Tout effort, sincère, de restauration de notre unité requiert la recherche et la publication de la vérité sur les atteintes à la dignité de l’Homme, considérées dans leur rapport à l’égalité des citoyens. Une telle quête détermine la profondeur et la solidité du modèle de réconciliation ; l’effort crèvera l’abcès du ressentiment réciproque et facilitera d’autant la conjonction des aptitudes et des énergies pour tendre vers la réalisation d’aspirations indifférenciées au bien-être. A cet égard, il convient de réfléchir et d’adapter l’expérience prometteuse de l’Afrique du Sud, au travers de la commission Vérité et Réconciliation instituée par feu le Président Nelson Mandela, après la chute du régime de l’Apartheid. D’ailleurs, des pays arabes – Maroc et Tunisie – s’en sont inspirés, pour clore le contentieux de leurs « années de braise ». Il n’est que justice, pour les victimes, leurs proches et l’ensemble de la communauté nationale, de connaitre les faits de contrainte, de spoliation, de déportation, de torture et d’homicide afin d’en publier la chaîne officielle de commandement, l’instigation et les complicités, y compris parmi les civils : Qui a fait quoi ? Qui a donné les ordres ? Qui sont les exécutants ? Ces actes étaient-ils planifiés ? Si oui, à quel niveau ? Se prémunir de la récidive et nettoyer la commémoration de l’Indépendance de la souillure des 27 au 28 novembre 1990 à Inal implique la sagacité, saine, de mettre un terme à l’occultation et au déni.

3.5. L’Etat de droit

Pour en finir avec l’emprise des ethnies, tribus et régions sur la vie politique, il est plus qu’urgent de refonder un cadre d’arbitrage, auquel le concitoyen recourt, avec le sentiment de l’équité, loin du déterminisme par la naissance. L’Etat qu’il urge de réformer pour le ramener à sa vocation initiale, ne reconnaît que des administrés, point de collectivité subjective dont la compétition dilue l’impartialité des institutions et favorise le règne de la médiocrité. A cet égard, une première condition réside dans la transparence des concours de recrutement à la fonction publique, dans l’armée et les forces de sécurité. Ainsi, le Mauritanien n’aura plus besoin d’en appeler aux « siens » pour obtenir son droit. Tous recouvreront, enfin, la certitude, sereine, d’appartenir à une nation dans laquelle seule l’utilité sociale les distinguera. Par la méritocratie, le fait d’accéder à un emploi ou obtenir une promotion n’obéira plus qu’à des critères de rationalité. Il serait fort judicieux et de prévoyance élémentaire de promulguer une loi anti-népotisme, comme il en existe dans de nombreux pays, pour prévenir le monopole et la mainmise indus.

3.6. La citoyenneté

Rien n’est plus blessant, plus révoltant que de se voir contester sa qualité de citoyen ou mettre en doute son patriotisme. Il n’appartient à personne, à aucune catégorie, de s’ériger juge d’intention ou pourvoyeur de certificats en ces domaines. Pourtant, certains arrivent à aborder leurs compatriotes en étrangers et peuvent les suspecter de trahison au motif d’une continuité démographique ou culturelle dans un pays voisin. Or, la règle universelle du rattachement exclusif à un territoire, confère la qualité de ressortissant à toute personne détentrice des documents d’état-civil correspondants. La dénégation du patriotisme des uns a servi de prétexte à des gouvernements prédateurs, pour réduire drastiquement les chances d’accès de certains à de hautes fonctions dans des secteurs dits sensibles, comme les forces armées et de sécurité…

Aujourd’hui, l’appréhension enfle de voir les abus initiés par des régimes dont le seul souci était la perpétuation de leur pouvoir, se transformer en usage acquis. Or une telle tendance constituerait une grave régression par rapport aux idéaux de l’époque des pionniers, à savoir l’opportunité, pour tout Mauritanien, d’exercer une responsabilité publique quelle qu’en soient la préséance, la densité ou la rémunération. Nous pensons que l’administration et les structures d’un État sain doivent refléter la réalité de la diversité de son peuplement. Elles doivent être plus proches des citoyens où qu’ils soient, sans considération de l’ascendance, de la culture ni du lieu. Il serait judicieux, à cette fin, de pratiquer une dose de discrimination positive, au profit de certaines composantes ou couches, dans les domaines où elles accusent un retard flagrant. La mention concerne, en priorité, les descendants de l’esclavage, une pratique mainte fois abolie mais dont la mémoire, toujours vive, continue d’alimenter des rapports de domination.

3.7. L’Islam, ferment de concorde

Malgré le tableau sombre et sa part de désillusion crue, il subsiste la faculté de sauver notre cohésion nationale.  Ce qui nous rapproche, paraît, de loin, supérieur aux facteurs d’éloignement.

D’emblée, s’impose, à ce stade du propos, l’attache indestructible à l’anse de la spiritualité. En Mauritanie, tous grandissent dans un Islam sunnite, de rite malékite, et de doctrine ach’arite; ils déclinent la psalmodie du Coran selon la lecture que Warch a apprise de Nafa’e. L’Islam est un dénominateur commun qui offre de réelles chances de rebâtir la concorde. En outre, l’appartenance à une confrérie religieuse devrait dissoudre, sinon amoindrir, l’écart entre disciples parce qu’elle transcende, a priori, les considérations temporelles. Les deux principales obédiences Soufies répandues en Mauritanie et dans la sous-région – Qadiria et Tijania – comptent des devanciers et des émules, toutes ethnies confondues, qui se réunissent dans les cercles de prière et autres rituels de dévotion. Oui, de telles convergences n’ont, certes, pu empêcher l’esclavage, le système de caste ni des accès d’exaction et de tuerie aggravés de racisme ; elles n’en demeurent pas moins une thérapie sous-exploitée, si ce n’est, du moins, la plus disponible et familière à nos compatriotes.

Conclusion

Le COLLECTIF des CADRES MAURITANIENS EXPATRIÉS ne prétend détenir une baguette magique pour lever le péril de la désagrégation qui menace la continuité du pays, si les solutions adéquates continuaient à faire défaut. En revanche – et ainsi s’affiche l’ambition de la présente note – il nous appartient de tirer la sonnette d’alarme et d’être porteurs de propositions concrètes et dénuées de passion afin d’alerter l’opinion et les décideurs sur les conséquences désastreuses de la désinvolture et de la négligence dans le traitement des conditions, symboliques et concrètes, à la coexistence paisible du peuple.

Les Mauritaniens, gouvernants en tête, doivent courageusement regarder de face les fissures qui grèvent le projet national afin de les combler, à temps. La volonté du vivre-ensemble, le désir de la communauté de destin présupposent la reconnaissance et la valorisation du patrimoine multi-ethnique. La nécessité de regarder dans la même direction, voire de concevoir ensemble un avenir radieux, valent bien un supplément de reconnaissance mutuelle pour surmonter la tentation du repli sectaire. Il n’est pas dans l’intérêt de la collectivité de laisser ses enfants grandir dans le mépris, l’ignorance de l’autre et les fantasmes de la revanche.

Des pays récemment ébranlés par des événements tragiques ayant mis en cause leur existence même avaient eu des dirigeants qui se pensaient à l’abri des bourrasques qui les ont emportés. Rien, en apparence, ne prédestinait ces pays au déclin, encore moins à la désintégration, sauf, souvent, la négligence, l’irresponsabilité, le réflexe du déni, en somme une part de cécité qui caractérisait leurs élites. La Mauritanie, entité hétéroclite dont les forces centrifuges gagnent jour après jour en vigueur, offre, à présent, un terreau sur lequel s’enracine la pousse de la division. A rebours, grandit le besoin d’une résolution forte et diligente, de la part de dirigeants clairvoyants, sages et courageux, de nature à endiguer la dynamique des aventuriers et apprentis-sorciers de tout poil, qui s’emploient à en découdre, peu soucieux de la fragilité de l’édifice où ils s’abritent. Aujourd’hui, forts de l’épreuve et des illusions perdues, il nous appartient de regarder notre passé avec l’objectivité autocritique, en vue de préserver le minimum encore viable et mieux préparer l’avenir. L’unité nationale ne se fructifie sur le substrat stérile de l’occultation ni la fausse promesse de l’acrimonie.

Recommandations :

        1. Pour maintenir et stabiliser l’unité nationale, il est impératif que les autorités promeuvent la concorde et l’entente entre tous, éradiquent la violence et les sources de partialité et veillent à la stricte application de la loi, en cas d’abus, pour qu’au moment de l’affliction et du doute, la pratique de l’égalité vienne rassurer, conforter, pacifier.

        2. Initier une réforme de l’éducation nationale pragmatique, concertée et dépouillée d’idéologie. Elle devrait instaurer une initiation bilingue, unifiée et obligatoire, en Arabe et Français ; ce

tronc commun permettrait la maîtrise des deux langues au terme du cycle secondaire. La communication n’en serait que plus aisée, à l’intérieur du pays mais aussi avec les environnements arabe et subsaharien. La promotion des langues nationales devra être une composante de cette réforme envisagée.

        3. Intégrer un programme obligatoire d’initiation à la citoyenneté non seulement à l’école mais aussi à la fonction publique et dans les grandes entreprises parapubliques. Le programme devrait comporter un socle commun au sujet de l’histoire nationale et le respect des symboles de l’Etat, et imposer l’apprentissage d’au moins une seconde langue nationale.

        4. Pour les exécutions extrajudiciaires et les déportations de populations vers le Sénégal et le Mali à la fin des années 80 et début des années 90, faire courageusement face à notre douloureux passé pour en panser définitivement les plaies. Pour cela, il faudra faire toute la lumière sur lesdits crimes, établir la chaîne des responsabilités et créer un climat favorable au pardon que seuls les ayants-droits sont en mesure d’accorder. L’expérience sud-africaine en la matière est une riche source d’inspiration.

        5. Rétablir de façon concrète et effective les anciens déportés dans leurs droits : restitution des terres et des documents d’état-civil

        6. Mettre un terme à la confiscation des terres et rendre obligatoire des concertations avec les détenteurs des droits réels si des investisseurs envisagent de mettre en valeur les terres agricoles. Les Directives volontaires[2] pour une gouvernance responsable des régimes fonciers pourraient largement y aider.

        7. Assurer la transparence des concours de recrutement à la fonction publique, l’armée et les forces de sécurité qui doivent être représentatives de la Mauritanie plurielle.

        8. Initier une politique économique et sociale inclusive qui permettrait d’associer toutes les composantes nationales à la gestion et au partage des ressources.

        9. Favoriser un traitement préférentiel pour certaines catégories de populations qui accusent un retard dans le partage des responsabilités et des ressources au niveau national.

        10. Obliger les médias publics à (i) instaurer une équité dans les programmes pour toutes les composantes nationales, (ii) une diversité des sujets et (iii) la diffusion de programmes citoyens, y compris ceux facilitant l’intégration et l’entente entre les citoyens.

        11. Aller vers une vraie et juste libéralisation des médias. Elle doit être représentative de la diversité de la population mauritanienne et toutes les composantes nationales doivent y trouver leur compte. La préservation de la diversité nationale n’a pas de prix ; elle peut cependant avoir un coût qu’il faut accepter de payer.

        12. Combattre à travers la loi et les organes d’autorité de l’Etat tous les actes, évènements et propos faisant l’apologie de stigmatisations basées sur les anciennes ségrégations sociales (castes), l’esclavagisme, et le racisme.

            13. Faire la promotion à tous les niveaux (de l’école aux services de l’Etat, en passant par les organes d’information publique) des principes de l’égalité de tous devant la loi, le respect des droits de l’homme, le respect de la dignité humaine et la préservation de la cohésion nationale.

Novembre 2018


[2] Les Directives Volontaires constituent une convention internationale initiée par la FAO et signée par plus d’une centaine d’Etats dont la Mauritanie. Le document met en exergue les principes directeurs d’une bonne gouvernance foncière.

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